l’invité de la semaine: Gérard Krawczyk passe à la littérature

un article pour Voir | publié le 6 mars 2018

Connu comme réalisateur (la série des Taxi, l’été en pente douce …), Gérard Krawczyk a livré son premier roman cet hiver: un thriller sensuel sur fond d’attentat dans Paris, nommé Foudroyé(s). 

GK©Virginie Branchunew

Vous êtes plutôt connu pour le cinéma, et l’écriture de scénario. Pourquoi avoir voulu passer sur le format livre et quelles sont les différences que vous avez pu noter entre les deux exercices ?

Quand on écrit un scénario, on gère une foule de contraintes. Tout ce que l’on décrit va avoir un coût en production. Le nombre de décors, leur nature, les figurants, la saison, la météo, si c’est de jour ou de nuit etc… Mais il y a aussi le rythme, la temporalité et l’intériorité des personnages. Au cinéma, vous ne pouvez pas vous permettre de digresser sinon vous risquez de perdre le spectateur. Vous ne pouvez pas non plus exprimer directement ce qu’il se passe dans la tête de vos personnages à moins d’utiliser une voix off qui alourdira le film. Dans un roman, vous pouvez plonger le lecteur directement dans les pensées les plus intimes de vos protagonistes. Vous pouvez aussi dans la même phrase faire un flash back ou un flash forward puis revenir au présent. Au cinéma, le maniement de la temporalité est beaucoup plus délicat. Ecrire un livre m’a permis de m’affranchir des contraintes du cinéma. Ma liberté était totale. Ce qui était vertigineux. Et pouvait devenir inhibant. La littérature reste un espace de grande liberté.

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Le livre est l’histoire d’une passion destructrice, très charnelle. On dit souvent que les scènes de sexe au cinéma sont les plus difficiles à tourner. Est-ce la même chose pour les écrire ?

Au cinéma, il est souvent plus difficile de filmer un acteur dire « je t’aime » que de le faire se battre avec un rival. Et encore plus risqué de poser sa caméra sur une étreinte. Cela peut devenir vite ridicule, trivial, obscène. Je pense que c’est ce qu’il y a de plus compliqué à mettre en scène. Si c’est raté et que vous entendez ricaner les spectateurs, il ne vous reste que la honte. J’ai été confronté à cette problématique dans mon deuxième film « L’été en pente douce ». Et j’ai été fier de voir qu’il était en bonne place dans l’ouvrage de Gérard Lenne « Erotisme et Cinéma ». En littérature, la difficulté et les risques sont les mêmes. Simplement vous n’avez pas à diriger les acteurs.

Dans le livre, vous évoquez les attentats- de celui de l’école juive de Toulouse à ceux du Bataclan. Pourquoi avoir choisi ce timing ? 

J’ai été bouleversé, comme nous tous, par ces massacres. Il se trouve que j’habite dans le 11ième arrondissement, lourdement frappé. Comment en est-on arrivé là ? Je me suis dit qu’une histoire d’amour était la façon la plus forte pour aborder ce questionnement. La petite histoire qui fait écho à la grande. Avec ses moments émouvants, désespérés, souvent drôles. La vie. Et devant la montée des communautarisme religieux qui veulent régenter, entre autres, le sexe, la position de la femme dans la société, je ne voulais pas éluder le lien charnel de mes deux personnages. Une façon de dire « non » à la régression qui monte.

Le roman se déroule sous une forme de policier, plus que de roman dramatique : pourquoi ce format ?

Les rapports humains, amoureux, peuvent se révéler assassins même si concrètement il n’y a pas meurtre. La forme policière me permettait d’utiliser cette métaphore et de maintenir une tension.

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Est-ce qu’un jour vous avez l’envie de porter ces personnages à l’écran ?

Oui, bien sûr. J’aimerais bien que ce soit quelqu’un d’autre qui s’en empare. Et les personnages, pas seulement les principaux mais la tribu autour d’eux, semblent toucher les lectrices et les lecteurs qui me demandent s’il y aura une suite…

Vous venez d’achever le tournage d’un film en Chine. Est-ce que vous pouvez nous en dire deux mots ? La manière de travailler est très différente là-bas ?

C’était une expérience unique puisque j’ai tourné en Mandarin et en Ouighour. Je suis maintenant en plein montage. J’ai tourné dans le XIngjiang et à Shanghai. Parler de ce tournage nécessiterait sans doute… un livre.

Foudroyé(s), Gérard Krawczyk, Le Cherche-Midi (19e)

Gérard Krawczyk sera en dédicace au Salon Livre Paris du 16 au 19 mars 2018 Porte de Versailles.

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