Françoise Fabian « Quand j’étais jeune, on m’appelait la fille au compas ! »

Comédienne mythique, chanteuse à la voix d ‘or, Françoise Fabian se livre sur ses combats féministes.

Ce que les gens adorent chez vous aussi, c’est votre manière d’assumer votre âge : vos rides, la mèche blanche… Ca fait tellement du bien !

On parle des comédiennes, mais beaucoup de femmes essaient de cacher leurs âges. Moi j’assume physiquement et moralement. Ce qui est terrible avec la chirurgie esthétique, c’est que toutes les femmes se ressemblent. Je ne sais pas qui fait ça… regardez toutes ces merveilleuses comédiennes américaines qu’on ne reconnaît pas après leur passage chez le chirurgien ! Je ne comprends pas ce jeunisme à tout prix, comme si c’était honteux de prendre de l’âge. Ce n’est pas honteux de prendre de l’âge ! Ca peut être bien même. Ca dépend aussi comment on le prend. Si on vieillit en se plaignant tout le temps, en gémissant : on ne profite de rien. Car on se plaint de soi, du temps, des autres… Mais merde ! Il faut prendre les choses comme elles sont et essayer de faire au mieux. Aimer la musique, lire, les arts et essayer de se faire des amis ! Ne pas s’intéresser qu’à soi-même. C’est magnifique de vieillir quand on l’accepte !

Je sais que vous avez beaucoup milité pour l’avortement. Peut-être que s’assumer telle qu’on est aujourd’hui avec ses rides pourrait être un nouveau combat…

S’assumer telle qu’on est dans sa vraie féminité en en tout cas. La vie des femmes a toujours été complexe. Le premier combat aujourd’hui, c’est comment les mères éduquent leurs enfants. Souvent les mères chouchoutent trop leurs fils. « Mon fils reste à table, c’est la fille qui va faire la vaisselle ». On lui donne les meilleurs morceaux, etc… Les mères sont aussi responsables de la manière dont les hommes sont. Qu’elles élèvent leurs fils comme elles élèvent leurs filles… Moi, je me suis beaucoup battue pour cela aussi.

Que vous inspire ce qui se passe dans le cinéma depuis l’affaire Weinstein ?

Ca n’a pas commencé dans le cinéma. Il y avait eu DSK avant… C’est dommage que les femmes parlent trop tard. Moi je me suis toujours défendue, même violemment. Les femmes ne sont pas sures d’elles car pour certaines, on leur a inculqué qu’elles étaient faibles. Alors que les femmes sont fortes. Lorsque un patron renvoie une fille parce qu’elle ne veut rien faire avec lui, il faudrait immédiatement le dénoncer ! Il faut dire que jusqu’à récemment, les policiers rigolaient face à ces cas. Il faut que ça change. En même temps, il faut que les femmes soient courageuses et dignes. On ne va pas empêcher les hommes d’essayer de nous séduire. Comme on ne va pas empêcher les femmes de séduire un garçon ! Mais la brutalité et le chantage, ça non. Quand j’étais plus jeune, je donnais des coups de coude. On m’appelait la fille au compas au lycée. Ma mère m’avait dit « si tu sens quelque chose, tu donnes un coup de compas ». Ca a été très efficace.